Drogues et assuétudes

En Belgique, la loi actuelle interdit le trafic et la détention de drogues, sauf pour l’alcool et le tabac. Or, la consommation augmente malgré les moyens déployés par les pouvoirs publics. Ce n’est donc pas la solution.

La lutte répressive contre l’usage des drogues a montré ses limites

Les drogues sont de plus en plus présentes. La prohibition a davantage aggravé les problèmes sociaux, sanitaires et sécuritaires qu’elle ne les a réglés.

La législation actuelle, qui, plutôt que de l’encadrer, réprime le commerce des drogues, conduit à la marginalisation des consommateurs, induisant des pratiques à risque de leur part et favorisant leurs contacts avec les milieux criminels.

L’information sur les drogues est abondante mais parfois contradictoire.

L’insécurité juridique règne et l’arsenal législatif en vigueur, essentiellement criminalisant et discriminant, est incompatible avec les valeurs laïques de responsabilité, d’autonomie et de liberté individuelle.

Une autre solution est possible: privilégier l’approche sanitaire et préventive

Fin des années 1990, le Centre d’Action Laïque a mis en place un groupe de travail, composé de juristes, de professionnels de la santé et de sociologues, chargé de réfléchir à la question des assuétudes en général et, plus particulièrement, des drogues, dans le but d’élaborer une position innovante en adéquation avec les valeurs laïques.

Le groupe de travail « Drogues » du CAL préconise la réglementation du commerce des drogues et la décriminalisation de la consommation. L’objectif est de privilégier l’approche sanitaire et préventive à l’approche judiciaire et répressive.

En 2002, une première proposition de modification législative visant à réglementer le commerce des drogues a été élaborée le Conseil Central Laïque (CCL).

En 2015, tout en conservant la philosophie initiale du projet, le groupe de travail « Drogues » du CAL a finalisé ce travail d’actualisation de la proposition de loi modifiant la loi du 24 février 1921 concernant le trafic des substances vénéneuses, soporifiques, stupéfiantes, désinfectantes ou antiseptiques.

Il s’agit notamment de ne plus traiter tous les produits indifféremment mais bien de proposer des dispositions distinctes pour le cannabis (associé au tabac et à l’alcool), les drogues dites « récréatives » (stimulants et hallucinogènes) et les opiacés (et dérivés).

Les avantages de la réglementation sont nombreux:

  • La fin du marché noir et de l’enrichissement des dealers
  • Des moyens policiers et judiciaires retrouvés pour d’autres tâches
  • Une amélioration de la santé des consommateurs grâce au contrôle des drogues
  • Une diminution du nombre de détenus en prison
  • Des moyens financiers accrus pour l’État grâce aux taxes et accises (cannabis)
  • Des moyens en plus pour la prévention de la toxicomanie
  • Un commerce équitable avec les pays producteurs

Les propositions du CAL: le cannabis en vente libre, les drogues sous contrôle

Télécharger le texte intégral de la « Proposition de loi réglementant la vente des substances stupéfiantes et psychotropes dans le cadre d’une expérience de santé publique » (PDF) du CAL

  • Cannabis:
    • En vente libre et production libre.
    • Meilleurs contrôles pour empêcher la vente de cigarettes et de cannabis aux mineurs de moins de 16 ans, de spiritueux aux mineurs (18 ans).
  • Héroïne, cocaïne et amphétamines:
    • En dispensaire, sous contrôle d’un médecin.
    • Vente de drogues produites par des firmes pharmaceutiques.
    • Interdiction aux mineurs (18 ans).
  • Ecstasy, LSD, champignons hallucinogènes:
    • En comptoir spécialisé, sous contrôle d’un médecin ou du médecin généraliste.
    • Vente de drogues contrôlées par l’État.
    • Interdiction aux mineurs (18 ans)

Drogues et mineurs d’âge

Une attention particulière est portée aux mineurs d’âge, au contrôle des produits, au commerce de ces drogues et à l’information pour les consommateurs, y compris d’alcool. Seule la vente de cannabis serait autorisée pour les mineurs d’âges, de plus de 16 ans. La vente de toute autre drogue leur serait interdite.

La consommation, la production et la vente en-dehors de la loi resteraient l’objet de poursuites et de sanctions.

La réduction des risques

Conscient qu’une législation seule ne constitue pas l’unique réponse, le CAL s’est associé, en 2005, avec la Ligue des Droits de l’Homme, la Liaison antiprohibitionniste, Modus Vivendi et les FEDITO bruxelloise et wallonne, au sein d’une Plateforme de réduction des risques.

La réduction des risques est une stratégie de santé publique visant à prévenir les dommages liés à tous les usages de drogues (expérimentaux, récréatifs, ponctuels, abusifs, ou inscrits dans une dépendance) pour des personnes qui ne peuvent ou ne veulent pas s’abstenir d’en consommer. Cette approche s’inscrit dans une démarche de promotion de la santé physique, mentale et sociale, mais aussi de la dignité et de la citoyenneté des usagers.

Dans ce cadre, le CAL a notamment contribué à l’élaboration d’une Charte de la réduction des risques, signé l’Appel à soutenir l’ouverture de salles de consommation à moindre risques (SCMR) en Belgique et soutient en Belgique la campagne mondiale Support. Don’t Punish à l’initiative du Consortium International sur la Politique des Drogues (IDPC) en vue de promouvoir des politiques en matière de drogue qui respectent les droits humains et protègent la santé publique.

 


Photo: © Charlòn, CC BY-NC-ND 2.0